Paris, 15 juin 2022, RG n° 20/03271.
La Cour d’appel a décidé dans un arrêt du 15 juin 2022, au sujet d’une marque composée de la forme d’un luminaire que :
« Le caractère distinctif d'une marque signifie que cette marque est apte à identifier le produit pour lequel est demandé l'enregistrement comme provenant d'une entreprise déterminée et donc à distinguer ce produit de ceux d'autres entreprises. Il doit être apprécié à la date de son dépôt par rapport à chacun des produits ou services visés par l'enregistrement et à la perception qu'en a le public auquel la marque est destinée.
La Cour de justice, dans son arrêt Henkel C-456/01 du 29 avril 2004 (considérant 38 et 39), après avoir dit que les critères d'appréciation du caractère distinctif des marques tridimensionnelles constituées par la forme du produit lui-même ne sont pas différents de ceux applicables aux autres catégories de marques, a toutefois rappelé que, dans le cadre de l'application de ces critères, la perception du public pertinent n'est pas nécessairement la même dans le cas d'une marque tridimensionnelle, constituée par la forme et les couleurs du produit lui-même ; qu'en effet, les consommateurs moyens n'ont pas pour l'habitude de présumer l'origine des produits en se fondant sur leur forme ou celle de leur emballage, en l'absence de tout élément graphique ou textuel, et que seule une marque qui, de manière significative, diverge de la norme ou des habitudes du secteur et, de ce fait, remplit sa fonction essentielle d'origine n'est pas dépourvue de caractère distinctif.
En l'espèce, le public pertinent est le consommateur, particulier achetant des luminaires pour éclairer son logement, vendus dans les magasins de bricolage, de lampes et de design, ou le professionnel, architecte, industriel ou commerçant, à la recherche d'éclairage sans toutefois être un spécialiste du secteur des luminaires. Il s'agit donc d'un consommateur moyen, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé.
La cour constate, comme le tribunal, que la forme de luminaire déposée, ne présente pas, à la date du dépôt, des caractéristiques suffisamment inhabituelles et étrangères au domaine en cause pour frapper particulièrement l'attention du consommateur visé, un luminaire en forme de tube étant très courant depuis les « tubes au néon » du début du XXème siècle de sorte que le consommateur la perçoit comme l'une des formes habituelles de luminaires. Les bandeaux de fixation apparaissent comme des éléments utilitaires pour la saisie, l'installation et la fixation, et les deux embouts circulaires métalliques présentant un rebord saillant, qui ont une fonction de protection du luminaire, sont tout à fait utilitaires. Il s'ensuit que ce signe, pris dans son ensemble, constitué d'une forme imposée par la nature et la fonction du produit, et qui confère au produit sa valeur substantielle, ne diverge pas de manière suffisamment significative des luminaires tubulaires habituels pour permettre au consommateur de le percevoir comme une indication d'origine des produits. Le tribunal doit donc être approuvé en ce qu'il a dit que le consommateur moyen de ce type de produits et services de luminaires ne peut percevoir le luminaire comme provenant nécessairement de la société S... et qu'en conséquence cette marque tridimensionnelle est dépourvue de caractère distinctif ».